Muscardin © Mickael Dole

Présentation et description

Muscardin, Haute-Savoie, Chaumont, juillet 2017 © Christian Prévost

Egalement appelé rat d’or en raison de la coloration de son pelage ou bien encore croque-noisettes pour sa forte appétence pour le fruit sec, le muscardin Muscardinus avellanarius est  le plus petit représentant de la famille des Gliridés. Sa fourrure brun-orangée à rousse est légèrement teintée de noir sur le dos tandis que son ventre est plus clair. Sa queue est velue mais nettement moins touffue que celle des autres représentants de sa famille (loir et lérot). Celle-ci est aussi longue que son corps, soit 6 à 9 centimètres, et présente la particularité de pouvoir se sectionner ce qui lui est parfois utile face à un prédateur. Son poids oscille entre une quinzaine et une quarantaine de grammes. Ses oreilles sont relativement petites, peu velues, mais bien apparentes. Ses grands yeux noirs globuleux et ses longues vibrisses lui sont d’un grand recours pour ses déambulations nocturnes. Parmi les adaptations morphologiques notables de l’espèce, citons des membres préhensibles, des coussinets sur la face inférieure des pieds et des articulations permettant de former un angle droit avec l’axe des pattes. Si on ajoute de longs doigts équipés de griffes courtes mais solides, le muscardin a alors tout l’équipement nécessaire à sa vie arboricole.

Il n’existe qu’un seul représentant du genre Muscardinus dans l’ensemble de son aire de répartition qui s’étend entre l’Angleterre, le sud de la Suède et la Lituanie, au nord,  jusqu’à la Mer Noire, l’Italie et la France, au sud. Actuellement aucune sous-espèce n’a été décrite. Dans l’ex-région Rhône-Alpes, l’espèce est autochtone, largement distribuée, mais reste parfois localisée ou peu abondante en raison du morcellement de ses habitats.

L’espèce est, avec le castor d’Eurasie, le campagnol amphibie et l’écureuil roux, la seule espèce de rongeur protégée à l’échelle nationale. Le muscardin figure à l’annexe IV de la Directive Habitats Faune Flore et à l’annexe III de la convention de Berne. Sur notre territoire, il est considéré comme non menacé, à savoir en préoccupation mineure sur la Liste Rouge des vertébrés de Rhône-Alpes (2008).

Comme dans toute son aire de répartition, l’espèce est connue comme quasi exclusivement crépusculaire et nocturne, mais les rencontres de jour sont malgré tout possibles.  Le muscardin peut ainsi  être observé lors de prospections ciblées (recherche de nids, de noisettes consommées), lors du contrôle de gîtes artificiels installés à son égard ou lors des visites de gîtes destinés aux Chiroptères (qu’il peut parfois aussi utiliser).

Le muscardin hiberne dans un nid au sol, sous la litière de feuilles ou dans une cavité peu profonde. Enroulé en boule avec sa queue rabattue sur son corps, le muscardin y dort d’octobre-novembre à mars-avril d’un sommeil plus ou moins profond.

La reproduction a lieu entre mai et août (voire septembre), période au cours de laquelle le muscardin  peut avoir une à deux portées de 3 à 7 petits.

Au cours de l’année, le muscardin se déplace assez peu, son territoire ne couvrant que quelques milliers de mètres carrés et son domaine vital ne dépassant pas un hectare. Les  jeunes en dispersion se fixent, en  général, à guère plus de quelques centaines de mètres de leur lieu de naissance ((JP. QUERE et H. LE LOUARN, 2011).

L’habitat privilégié du muscardin est constitué de forêts lumineuses à sous-bois denses, de fourrés, de taillis et de haies denses, l’espèce répugnant à se déplacer à découvert et au sol. Dans ses habitats, le muscardin bâtit des nids très caractéristiques, à base de feuilles, d’herbes et de mousses. Ses nids de sommeil mesurent environ 10/15 cm de diamètre et sont souvent installés entre 30 cm et 2 m de hauteur. Les nids de reproduction, plus gros, sont souvent installés plus en hauteur. Ainsi, sur 30 nids (de sommeil et de reproduction) suivis par C. GILLES en Haute-Savoie (en lisière boisée et dans des  ronciers), le nid le plus bas a été observé à 30 cm,  le plus haut à 2,50 m, pour une moyenne globale d’installation à environ 1,15 m de hauteur. Plus précisément, le suivi haut-savoyard a montré une moyenne d’installation de 1,05 m pour les nids de sommeil et de 1,60 m pour les nids de reproduction.

Concernant son régime alimentaire, Muscardinus avellanarius a une nette préférence pour les matières végétales (feuilles, bougeons, fleurs, glands, faines, noisettes, mures, framboises,…) qu’il complète parfois avec des insectes ou  des mollusques.

Etat des connaissances

Historique

En 1984, l’atlas des mammifères de France de la SFEPM (FAYARD/SFEPM, 1984) mentionnait une répartition du muscardin sur tout le territoire français (excepté la Corse) avec une abondance plus marquée dans la moitié nord-est du pays qu’en région méditerranéenne  et dans l’ouest ou il demeurait rare et localisé.

Le précédent atlas des mammifères sauvages de Rhône-Alpes (FRAPNA, 1997) indiquait que le muscardin ne semblait jamais abondant dans la région avec une répartition assez localisée (Dombes, Vercors, région de Grenoble, région de Crest, environ de Bourgoin), l’espèce fréquentant davantage les milieux collinéens et montagnards que la plaine. La carte de répartition de l’espèce montrait  alors une présence du muscardin sur une bonne moitié du territoire rhônalpin, avec des secteurs non occupés essentiellement localisés au sud de la Drôme, au sud et à l’ouest de l’Ardèche, au nord de la Loire, au sud de la Savoie, au nord de l’Isère.

Carte de l'état des connaissances sur le muscardin

Distribution actuelle

L’intérêt grandissant pour l’espèce et sa prise en compte lors d’études naturalistes et écologiques ont permis d’acquérir de nombreuses et récentes connaissances quant à la distribution du muscardin sur le territoire rhônalpin.

Pour exemple, dans la Loire, l’espèce n’avait fait l’objet que de 5 mentions avant 2000 (essentiellement découvert lors d’analyses de pelotes d’effraie) : plaine du Forez, Monts du Forez et du Lyonnais. Suite aux intenses prospections menées par l’équipe salariée et par les bénévoles formés au cours de la réalisation du présent  atlas, le muscardin est maintenant connu dans 99 commune du Pilat, des gorges de la Loire amont, des Monts du Forez, des Monts de la Madeleine, du seuil de Neulise, des Monts du Beaujolais et  des Monts du Lyonnais. Il n’a pour l’heure pas été découvert dans la plaine de Roanne, le sud de la plaine du Forez et reste rare sur les zones urbanisées du bassin stéphanois et de la vallée du Gier.

A l’instar des efforts de prospections mis en œuvre pour le recensement du petit rongeur, la Haute-Savoie demeure le département qui fournit le plus de données sur l’espèce : plus de 600, soit environ 56 % de la totalité des observations rhônalpines. Dans ce département, l’espèce est principalement observée à basse  altitude (400-700 m), essentiellement sur la moitié nord-ouest du département, au dessus d’une ligne imaginaire Rumilly /Evian (C. GILLES, 2020).

Les départements de l’Isère, de l’Ain, du Rhône et de la Drôme  sont plus ou moins bien couverts par la présence du rat d’or (respectivement 207, 82, 36 et 92 données), alors que la Savoie et l’Ardèche présentent une répartition plus rare et localisée (29 données pour la Savoie…. et une seule pour l’Ardèche).

Les observations directes utilisées dans le cadre du présent atlas concernent des individus en activité dans leur habitat (se déplaçant, se toilettant), en cours de consommation (noisettes, glands, mures, ), en repos dans des gites artificiels (gites à chiroptères, nichoirs, tubes à muscardins), parfois aussi des cadavres (morts dans leur nid, au sol), alors que les observations indirectes sont principalement la découverte de noisettes consommées avec signature muscardin et la découverte de nids (dans les haies, les fourrés de prunelliers, les ronciers, les zones d’églantiers, les saulaies, les framboisiers, les noyers,…). La découverte de restes osseux dans les pelotes de réjection de rapaces nocturnes (chouettes hulotte et effraye) reste très minoritaire (moins de 3% des données).

Muscardin, Franclens, Haute-Savoie, septembre 2013 © Christian Prévost

Menaces et conservation

Muscardin, Matheysine, octobre 2009 © Loïc Nowak

Malgré sa protection juridique, le muscardin souffre de la dégradation, de la destruction et de la fragmentation de ses habitats : arrachage et gestion radicale des haies, homogénéisation des haies et des boisements (stratification unique, enrésinement), broyage des taillis, des lisières et des ronciers,… Un vrai travail d’information et de sensibilisation devrait être entrepris afin de faire connaitre l’espèce et ses habitats auprès des agriculteurs et forestiers et, plus généralement, du grand public.

La prédation sur l’espèce est plutôt limitée au vu de l’habitat de prédilection du petit rongeur, souvent difficilement accessible pour les carnivores aériens et terrestres. Néanmoins, le muscardin est parfois consommé par les rapaces nocturnes (observé dans le Rhône ou dans la Loire) ou par les chats domestiques (observé en Haute-Savoie).

Enfin, le réchauffement pourrait perturber  l’hibernation (entrée tardive en hibernation, réveils fréquents, sortie précoce d’hibernation) et modifier ainsi le cycle de vie du muscardin.

La recherche du muscardin dans le département de la Loire (LPO 42)

Jusqu’en 2017, le muscardin était très peu connu dans le département de la Loire. En effet, seulement 14 données mentionnaient l’espèce et 5 étaient antérieures à 1996.

Pour la réalisation du présent atlas, nous nous sommes penchés sur cette espèce et avons commencé à chercher des noisettes rongées de façon caractéristique. Lors de cette première année de prospection, nous nous sommes rendu compte que l’espèce semblait plus présente que ce que nous pouvions imaginer puisqu’elle fut découverte dans une vingtaine de commune.

En 2018, grâce au soutien du Conseil départemental, la LPO Loire a décidé de mené une étude sur la répartition des Gliridés dans le département. Concernant le muscardin, nous avons passé une dizaine de jours sur le terrain avec l’objectif de visiter 18 mailles prioritaires exemptes de données. Finalement, grâce à une bonne efficacité sur le terrain, ce sont 28 mailles qui ont été visitées.

Les prospections ont été réalisées entre  début aout 2018 et mi-octobre 2018 : 199 données ont été collectées, dont 45 étaient positives. La plupart de ces dernières concernent la découverte de noisettes caractéristiques et pour deux d’entre elles, la découverte d’un nid en plus des noisettes. En résumé, l’espèce a été recherchée sur 64 communes et découverte sur 33 communes réparties sur 19 mailles différentes.

En 2019, les prospections bénévoles continuent. De plus, des sorties collectives ont été organisées afin de former de nouveaux observateurs à  la recherche de ce petit mammifère dont la connaissance a été grandement amélioré ces dernières années dans la Loire !

Muscardin © Mickael Dole

Rédacteurs : Christophe GILLES, Emmanuel VERICEL et Bertrand TRANCHAND, décembre 2019