Présentation et description
Mustélidé semi-aquatique de taille intermédiaire (exceptionnellement jusqu’à 75 cm), et pouvant peser jusqu’à 2,2 kg dans la nature, le vison d’Amérique (également appelé vison américain) peut potentiellement être confondu avec le vison d’Europe (Mustela lutreola) ou encore le putois d’Europe (Mustela putorius), ces deux derniers étant plus petits. En théorie, le critère de distinction entre les deux espèces de vison est basé sur la forme de la tâche blanche en dessous du museau qui n’est jamais présente au-dessus de la lèvre supérieure chez le vison d’Amérique, alors que le menton et la lèvre supérieure présentent cette tâche blanche chez le vison d’Europe (FOURNIER, 2003).
L’appartenance de cette espèce au genre Mustela reste relativement controversée, la plupart des auteurs l’affiliant au genre Neovison (WILSON et al., 2005), dont il serait le dernier représentant depuis la disparition du vison de mer (Neovison macrodon). Le genre Neovison différerait du genre Mustela de par un nombre total de chromosomes inférieur. Dans son aire de répartition d’origine (Amérique du Nord), quinze sous-espèces ont été décrites. Suite à de nombreux croisements entre chacune des souches et l’absence d’analyses génétiques, il semblerait impossible de déterminer avec exactitude la ou les sous-espèce(s) présente(s) en Rhône-Alpes, d’autant plus qu’une variété d’élevage, plus imposante que les individus sauvages, a vu le jour suite à ces croisements.
En France, l’espèce est considérée comme allochtone et invasive. Son statut de conservation à l’échelle nationale demeure non applicable, mais elle est inscrite sur la liste des espèces en préoccupation mineure à l’échelle mondiale. Ce taxon s’est répandu accidentellement en dehors de son aire de répartition, car il était élevé pour sa fourrure afin de remplacer celle du vison d’Europe, très largement exploitée au cours du XXème siècle, menant quasiment à l’extinction de l’espèce et les difficultés qu’on lui connait à l’heure actuelle. En France, l’élevage du vison d’Amérique débute dès décembre 1926 avec quinze individus reproducteurs importés des Etats-unis. Un peu plus tard, aux alentours de 1930, la majorité de ces élevages disparaît suite à la crise économique de 1929 (LEGER, 2008). La plupart des observations de cette espèce font donc suite à des évasions d’élevage. À l’heure actuelle, il ne reste plus que neuf de ces élevages de visons en France métropolitaine.
Le vison d’Amérique est également classé « nuisible » sur l’ensemble du territoire métropolitain. Cela est notamment lié à une compétition avérée entre le vison d’Amérique et d’autres espèces autochtones tels que le campagnol amphibie (Arvicola sapidus) (BONESI & PALAZON, 2006) ou encore le putois d’Europe (Mustela putorius) (ROMAN, 2007). Suite à l’arrêté du 24 mars 2014, le vison d’Amérique peut être piégé toute l’année et en tout lieu. Il peut être détruit par tir sur autorisation individuelle délivrée par le préfet entre la date de clôture générale et la date d’ouverture générale de la chasse.
Diurne et nocturne, le vison d’Amérique reste actif toute l’année. Dès la fin de l’hiver, le mâle quitte son territoire et part à la recherche de femelles pour s’accoupler. Dans les populations bien structurées et viables, chaque femelle copule avec trois mâles par an en moyenne. La période de rut a lieu de février à avril. La gestation dure entre 36 et 76 jours mais le développement embryonnaire ne dure que 28 à 33 jours et la femelle donne naissance à quatre petits en moyenne (de deux à dix). Au bout de dix mois, les jeunes visons obtiennent leur maturité sexuelle et partent à la recherche d’un territoire ; en effet, il s’agit d’un animal territorial, sédentaire et solitaire. Le domaine vital du vison d’Amérique oscille généralement entre 8 et 20 ha. La densité quant à elle, varie de 1 à 8 individu(s) par km², ce qui n’est pas le cas en Rhône-Alpes.
Etat des connaissances
Historique
Seulement 2 observations de vison d’Amérique sont recensées en Rhône-Alpes dans les bases de données de l’atlas : la première a été réalisée le 23 décembre 1993 (LO PARVI) sur la commune de Courtenay (38), la seconde a été réalisée le 16 septembre 2014 (C. Frégat) sur la commune de Salavre (01).
La première observation de 1993 a été faite pendant une période où les visonnières intensives étaient répandues en France, il est donc probable qu’il s’agisse d’un individu s’étant échappé d’une de ces structures. Il en va de même pour la seconde observation, qui se trouve à moins de 20 km à vol d’oiseau d’une visonnière basée sur la commune de Ramasse (01).
D’autres données historiques ont également été mises en avant par une étude (LEGER, 2008). Cette dernière stipule que le vison d’Amérique aurait été détecté dans le Bugey (01), en Isle Crémieu (38), dans le Roannais (42) ainsi que dans la région Lyonnaise (69). Ces données dateraient d’une période allant de 1990 à 1999.
Distribution actuelle
Le vison d’Amérique est globalement présent dans toute l’Europe, surtout dans sa partie la plus septentrionale, mais sa répartition reste néanmoins très éparse. En effet, ce dernier est uniquement présent là où il a été importé par l’Homme. En France, 3 populations férales sont connues de l’ouest de la Bretagne à Midi-Pyrénées. Les autres foyers de présence, comme en ex région Rhône-Alpes, sont exceptionnels et anecdotiques, aucune autre population viable n’étant connue à l’heure actuelle.
Cette espèce est ubiquiste mais affectionne particulièrement les zones humides, ainsi que les milieux semi-aquatiques, qui proposent une niche écologique favorable. L’espèce avait été observée à moins de six mètres d’un étang le 23 décembre 1993, ce qui confirme bien ses affinités écologiques. Les deux observations de vison d’Amérique ont été réalisées à une altitude d’environ 270 mètres.
Impact et gestion
L’impact du vison d’Amérique sur la biodiversité locale est réduite à de la compétition interspécifique.
Il occupe les mêmes habitats que le vison d’Europe, qu’il chasse aisément de par sa taille. Les individus de vison d’Amérique issus de captivité, ou ils sont souvent maintenus à proximité les uns des autres, ont développé de nombreux agents pathogènes qu’ils retransmettent à l’état sauvage au vison d’Europe. Ces différents facteurs participent en partie au déclin du vison d’Europe sur les territoires ou les deux espèces sont présentes. Pour rappel, le vison d’Europe n’a jamais été observé en Rhône-Alpes. Néanmoins le vison d’Amérique est porteur du virus de l’influenza mais également de la maladie aléoutienne. C’est donc plutôt sur ces aspects que sa présence dans nos contrées pourrait poser problème, même en l’absence d’une population importante.
En grand effectif, ce dernier peut potentiellement décimer des populations d’espèces sensibles tels que les amphibiens ou les petits mammifères. De plus, sa compétition avérée avec d’autres espèces de Mustélidés peut également amener une certaine instabilité dans les écosystèmes. Dans l’ouest de la France, cette espèce est piégée pour limiter son influence, mais le piégeage effectué antérieurement a certainement contribué à la diminution globale du vison d’Europe car les confusions sont possibles (malgré les formations mises en place à destination des piégeurs sur le sujet).
Rédacteurs : Dimitri LAURENT et Francisque BULLIFFON, décembre 2018